Histoire

Histoire de la mission Karen

Bien qu'ancienne de seulement cinquante ans, la Mission Catholique Karen a déjà une riche histoire, et de profondes racines. Le chemin de la Foi est passé d'abord par la Birmanie, où l’Évangile a été annoncé aux karens il y a près de deux-cent ans par les missionnaires catholiques et protestants baptistes.


Les missions catholiques en Birmanie


La mission karen en Thaïlande et la benjamine des missions des Pères des Missions Étrangères de Paris en Asie: à peine cinquante ans!
L'évangélisation auprès des karens de Birmanie est cependant bien plus ancienne. Si la mention des "karians" (ou "carians") apparaît plus tôt dans les récits de voyageurs, les premières communautés catholiques sont fondées au milieu du dix-neuvième siècle dans la région de Pathein et Mergui par les pères des Missions Étrangères. Dès 1866, les Missionnaires de Milan se chargèrent de Taungu et des provinces de l’ouest, ouvrant de nouvelles communautés chez les Karens. Des jeunes furent envoyés se former au séminaire de Penang et un clergé local se développa. A la fin du 19e siècle, l’Église était solidement implantée en Birmanie. La mission karen se développe surtout à partir du début du vingtième siècle, sur le modèle que nous connaissons encore aujourd'hui: basé dans un centre doté d'une petite chapelle et son école attenante, le prêtre rayonne dans les villages alentours, secondé par des catéchistes. La seconde guerre mondiale et l'indépendance accordée aux birmans devait marquer un rude coup d'arrêt aux progrès de la mission: les attaques successives des japonais puis la guerre civile plongeront la région dans des troubles qui n'ont toujours pas aujourd'hui tout à fait cessés.

le père Jean calmon célèbre la messe dans la forêt karen de birmanie avec ses chrétiens
Le Père Calmon célébrant la messe dans la forêt


Pour en savoir plus sur la figure du Père Calmon et la période de la guerre et après-guerre en pays karen, voir aussi notre article: des saints et des Héros: Hugh Seagrim et Jean Calmon, portraits croisés.

 Une figure se détache parmi ces courageux apôtres, qui ne craignent pas d'affronter les dangers de la jungle (les tigres sont endémiques en ces régions) pour visiter les villages les plus excentrés: le Père Jean Calmon. On peut dire, d'une certaine façon, qu'il a été l'un des pères fondateurs de notre Mission Catholique Karen en Thaïlande, car il a soutenu, de ses conseils et en envoyant ses catéchistes, la mission de Chiang Mai tenue par les Pères basques de Betharam, qui eux-mêmes aideront de leurs conseils notre mission naissante. Mgr Seguinotte, des Pères de Betharam, est le fondateur de la congrégation des sœurs karens de Mepon, qui servent aujourd'hui dans nos centres.

Avant d'aborder la fondation de la Mission Catholique Karen dans la région de Tak en Thaïlande, nous nous devons d'évoquer l’œuvre évangélisatrice auprès des karens des missions baptistes en Birmanie.


La mission karen baptiste


A la différence de la plupart des églises d'Asie, la région karen, tant en Birmanie qu'en Thaïlande, n'a pas été d'abord évangélisée par les missionnaires catholiques, mais par les missionnaires anglais et américains des missions protestantes baptistes. Travail sur la langue (dictionnaires, grammaires), la culture (premières esquisses ethnologiques), traductions (la première -...et la dernière!- Bible karen est baptiste), ces missionnaires d'origine souvent modestes, venus en Birmanie parfois avec femmes et enfants, ont accomplis en un siècle un travail missionnaire et intellectuel qui force le respect, dans des conditions plus que précaires.
Considéré comme le premier missionnaire protestant de Birmanie, le pasteur protestant baptiste Adoniram Judson (1788-1850) peut aussi être considéré comme le premier missionnaire du peuple karen. Après un ministère en pays birman bousculé par la guerre anglo-birmane, il se consacre à l'évangélisation des karens. Son premier baptisé karen, un brigand du nom de Ko Tha Byu, se fait auprès de ses frères l'ardent propagandiste de l’Évangile, qui rencontre aussitôt un succès considérable: les missionnaires baptistes constatent l'étonnante similarité des récits de fondations karens d'avec les grands récits bibliques, au point de suggérer un très antique première évangélisation qui aurait laisser des traces. Par ailleurs, les karens, bien qu'animistes, sont monothéistes. Un fort messianisme enfin justifie pour une part le succès de l'annonce de la Foi auprès du peuple karen.

portrait du rev adoniram Judson
Adoniram Judson
Judson est bientôt rejoint par un nouveau missionnaire américain d'origine anglaise, le Révérend Francis Mason (1799-1874). Tour à tour missionnaire, bâtisseur, naturaliste, c'est lui qui finalise les travaux sur la langue karen et achève la traduction de la première Bible karen.
Francis Mason
Grâce aux efforts des missions baptistes et catholiques, le pays karen birman compte au début du vingtième siècle près de 20% de chrétiens. En mettant en valeur l'identité karen, les pasteurs protestants ont contribué à encourager le sentiment national karen. Lors du soulèvement des karens après l'indépendance, ce sont les protestants qui forment le noyau de la guérilla.
 Les églises protestantes sont aujourd'hui encore très présentes chez les karens de Birmanie et de Thaïlande. On rencontre différentes dénominations baptistes, mais aussi adventistes, anglicans, etc.


Le Père Joseph Quintard (1934-2003)


Le père Joseph Quintard dans la mission catholique karen alain bourdery
Le Père Joseph Quintard
Arrivé en Thaïlande en 1961 pour apprendre la langue thaï, le Père Joseph Quintard est sollicité en 1963 par des karens du village de Maewe, dans la région frontalière de Tak en Thaïlande, qui souhaitent devenir chrétiens. Il se porte volontaire pour cet apostolat de montagne et rejoins la ville de MaeSot, dans le diocèse de Nakhon Sawan, frontalière avec la Birmanie. Depuis cette date et jusqu'à sa mort en 2003, il ne cessera de parcourir la région pour visiter les villages éloignés, poussant ses exploration jusqu'à la Birmanie voisine. Il est avant tout un pèlerin: c'est à pied qu'il visite ses villages, mangeant et dormant chez les habitants, administrant une petite communauté qui ne cesse de grandir à son contact. Les karens sont particulièrement touchés de l'intérêt que leur porte ce grand homme blanc qui parle leur langue et partage leur table. C'est aussi un bâtisseur infatigable: chapelles, pensionnats, écoles. Il investit particulièrement l'éducation, désireux de former une élite de jeunes karens qui deviendront les leaders de demain et soutiendront leurs frères.

professeurs de poblaki devant école construite par alain bourdery
Groupe de professeurs de l'école de Poblaki -2006
Notre zone de Ponouaipou-Poblaki lui doit tout: il parcourt en tout sens la piste qui rallie Ponouaipou à Merameung, et laisse dans son sillage des petites communautés à la Foi solide et fervente. Ce sont ces communautés qui deviendront les églises de Ponouaipou, Poblaki et Sohélou. On lui doit par ailleurs l'école de Poblaki, modeste construction de bois à ses débuts, qui a formé déjà deux générations d'élèves. Il est le premier à organiser un embryon de service de santé, en partenariat avec des médecins thaïs et français. En 1996, il perce avec l'aide des villageois une piste pour désenclaver les villages. Il décède lors d'un accident de voiture en 2003. Sa mémoire reste très vive chez les villageois, tant catholiques que bouddhistes.


-On peut consulter la notice biographique et la notice nécrologique du Père Joseph Quintard, sur le site des archives des Missions Étrangères de Paris.
-voir aussi la très belle bande dessinée de Thomas Oswald et Jean-François Cellier, Suis l'homme en blanc, aux éditions du Rocher, qui raconte l'improbable rencontre entre le Père Quintard et le premier converti de la zone de Ponouaipou-Poblaki.

Epoque contemporaine (Père Alain Bourdery, Père Nicolas Lefebure, Père Camille Rio)

en cours de rédaction...





Carte de la région de Tha Song Yang éditée par l'armée américaine en 1955. Les routes (et pistes) sont inexistantes. Le désenclavement de la zone commencera dans les années 90.

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